KIEV BOMBARDÉE: QUAND ON AGACE L’OURS, IL FINIT PAR SE FÂCHER
On sentait bien que ça allait finir par arriver. Les articles de la semaine dernière laissaient entendre que la patience de Poutine allait être mise à rude épreuve.
Au matin de ce lundi, un certain nombre de villes ukrainiennes ont essuyé des frappes aériennes ciblées. J’ai écouté quelques chaînes de grand chemin dans l’attente désespérée d’y trouver une information sinon intéressante, tout au moins rationnelle. Or si l’espoir fait vivre, le désespoir à la longue fait mourir.
L’analyse qui tourne en boucle est la suivante:
Poutine est vexé de l’action qui a endommagé le pont de Crimée, et donc Poutine se venge. C’est à peu près le degré zéro de la pensée. Cependant, comme je suis un éternel optimiste, je m’étais dit qu’enfin, les médias occidentaux allaient se résigner à offrir une analyse rationnelle et cohérente. On repassera.
La réalité c’est que les Américains qui tirent les ficelles de la marionnette Zelensky ont perpétré ou fait perpétrer plusieurs actes terroristes. L’odieux attentat contre Daria Douguine, le sabotage des gazoducs, les bombardements incessants contre la centrale nucléaire de Zaporojié et enfin la tentative de destruction du pont de Crimée.
Si tout ça mis bout à bout n’est pas une tentative de forcer Moscou à réagir, je ne m’y connais pas. Or aller raconter à qui veut l’entendre que Poutine est un sale gosse vexé qui se venge sur les civils, c’est franchement prendre les gens pour des imbéciles.
Réfléchissez deux minutes:
Zelensky prétend (à tort ou à raison, impossible de vérifier), que la Russie a envoyé 75 missiles à divers endroits du pays. Or, à l’heure où j’écris, on déplore dix morts et soixante blessés. Peut-être ai-je tort, mais si c’étaient les civils qui étaient visés, ça fait quand même un pauvre résultat. Un mort pour 7 missiles, quand on connaît le prix d’un missile, ça fait cher du mort. Pardonnez mon cynisme dont je suis conscient qu’il est un peu malvenu car ce soir mes pensées vont vers les familles endeuillées. Cependant, le raisonnement est tellement absurde, et la plupart des gens dans une telle incapacité de réflexion, que je me devais d’aborder la question ainsi.
La réalité, c’est que nous avons affaire à des dirigeants russes très rationnels. La tache de Poutine était politiquement compliquée. Il fallait à la fois calmer les plus radicaux qui, en Russie, veulent une guerre totale, tout en cédant le moins possible aux provocations. Il est en effet choquant de voir la quantité d’huile que les États-Unis et l’Union Européenne jettent sur le feu.
Vous aurez constaté comme moi que la “communauté internationale” ne fait strictement aucun effort pour trouver une solution pacifique. D’habitude, lorsqu’un conflit de la sorte éclate, priorité absolue est donnée à la cessation des combats. Les conférences internationales pour la paix succèdent aux missions de bons offices. Or ici, tout est fait pour que les belligérants ne se parlent pas. Pire, Zelensky a fait assassiner un membre de sa propre délégation lors d’une rare tentative de négociation en début de conflit.
Toujours dans l’outrance, Emmanuel Macron a parlé de “crime de guerre” pour qualifier les frappes de ce jour.
On rappellera qu’un crime de guerre est une action dépourvue de tout intérêt militaire. En l’espèce, ça va être compliqué à prouver. Parce que si on s’appuie sur le fait que les frappes sont loin de la ligne de front pour les qualifier en crime de guerre, il sera facile de les justifier sur un plan stratégique.
En frappant Kiev, Lvov et Kharkov, la Russie a démontré qu’elle pouvait reprendre l’initiative quand elle le voulait. Admettons, (ce qui reste à prouver) que la Russie soit en difficulté sur différentes parties du front, elle n’est absolument pas en peine d’ouvrir de nouveaux fronts où elle veut et quand elle veut. Sans eau et sans électricité à l’entrée de l’hiver, il va falloir à Zelensky beaucoup de talent pour rester populaire. soit dit en passant, les référendums au Donbas, à Zaporojié et à Kherson donnent une vague idée de l’état de la popularité du joueur de piano debout.
On peut douter hélas que l’action militaire de ce matin suffise pour ramener tout le monde à la raison et rechercher dans l’urgence une solution de paix. Il serait pourtant grand temps que place soit laissée aux négociations. Cela permettrait aux Ukrainiens de sauver dans le domaine territorial ce qui peut l’être, et aux Européens de freiner leur chute inexorable. Malheureusement, les États-Unis et ceux qui leur ont prêté allégeance ne l’entendent pas de cette oreille. Aux familles qui portent le deuil, de ne pas se tromper sur le véritable auteur du crime.
Jacques Frantz