UN JOURNALISTE, ÇA DÉSINFORME OU ÇA CHIALE

UN JOURNALISTE, ÇA DÉSINFORME OU ÇA CHIALE!

Tu te souviens peut-être lecteur que dans mon interview de la militante genevoise Chloé Frammery, il a été fait mention d’une pratique journalistique dont elle et d’autres ont été les victimes. Or voilà que je reçois avec mon café du matin, un mail d’une journaliste du canard déjà évoqué pour ses méthodes de voyous, qui se plains de menaces de mort. Rien que ça! L’article, que je vous mettrai en intégralité en annexe, étale les états d’âme de Mme Annick Chevillot. Vous ne la connaissez pas? Je vous rassure, moi non plus. Mais décidément, ces journalistes sont toujours en manque de notoriété. Aussi, quoi de mieux que de jouer les victimes pour s’extirper de l’anonymat. Le problème, c’est que d’autres y ont pensé avant avec, je le pense, davantage de réussite.

Donc Annick (vous permettez que je l’appelle Annick), a déposé plainte pour menace de mort suite à un propos sur Facebook dont voici l’intégralité:

«Le 16/10/1946, le journaliste nazi Julius Streicher fut pendu à Nuremberg pour avoir endormi le peuple sur les crimes du troisième Reich: …le Tribunal a conclu qu’un tel soutien médiatique à des crimes de guerre constituait lui-même un crime…
Il faudra penser à requalifier en crime contre l’humanité le fait d’avoir:
ruiné l’économie,
contaminé la population avec ses propres peurs irrationnelles,
provoqué des drames en santé mentale et des suicides, ainsi que
mis l’épidémie à profit pour s’enrichir avec des chimères ainsi que ruiner l’état de droit et les libertés fondamentales.»
J’invite Annick à ne pas porter plainte contre moi pour avoir cité in extenso le propos en question parce que c’est elle-même qui l’a rendu public et viral. Elle perdrait par conséquent son temps.

Je tiens à préciser que je ne m’associe pas aux propos qui font l’objet de la plainte, d’abord parce que je suis assez réservé sur la manière avec laquelle la justice a été rendue à Nuremberg, et ensuite, parce que j’aimerais bien qu’on arrête de regarder dans le rétroviseur et qu’on cesse de tout analyser à l’aune de la seconde guerre mondiale. J’ajoute que le propos est excessif, or tout ce qui est excessif est insignifiant.

Cependant j’ai appris des choses. Je ne savais pas que rappeler un élément factuel et historique constituait désormais une menace. La condamnation à mort puis l’exécution de Streicher avec 8 autres personnes est un fait avéré. C’est une manière violente d’interpeler une journaliste collaborant à un titre qui n’hésite pas à s’asseoir sur la déontologie. Bien entendu, Annick a bénéficié de la complaisance de la police qui, selon ses dires, l’a encouragée à déposer plainte, mais également de l’avocat chargé de la défendre. Je rappelle tout de même à Annick qu’à ce stade, le délit n’est pas constitué et qu’il appartiendra au seul juge de déterminer s’il y a eu menace. Si à l’issue de la procédure, la réponse était négative, il pourrait en cuire (judiciairement s’entend) à Annick et à son employeur. En aucune façon l’auteur incriminé ne souhaite la mort d’Annick. Il souhaite seulement que les journalistes qui ont soutenu dans l’exercice de leur profession le holdup sur nos libertés, nos droits et notre économie soient jugés pour “crime contre l’humanité”. Si Annick, au lieu de chouiner, avait fait correctement son travail, elle saurait que le “crime contre l’humanité” n’est plus puni de la peine de mort. Au reste, déjà à Nuremberg, d’autres sentences ont été prononcées.

Je m’interroge en revanche sur la manière avec laquelle ces journalistes qui se croient tout permis s’efforcent de limiter la liberté d’expression. Qu’Annick trouve ces propos choquant est compréhensible et c’est son droit. Mais pour aussi moralement contestable que ce soit, contrairement à son incitation, la haine n’est pas un délit. Cela constaté, loin de moi l’idée d’en faire son apologie.

Ce qui aurait été constructif, c’est que notre journaliste questionne ce qui a généré et qui génère encore une telle violence. La charité me commande de lui venir en aide. Tout en ignorant le propos qui a poussé notre internaute à s’exprimer de façon aussi véhémente, il faudrait qu’Annick et ses confrères prennent conscience que la caricature systématique, la diffamation et les méthodes douteuses de son journal employées à l’encontre de gens qui ont le seul tort de penser autrement finit par être blessant, offensant et générateur de désespoir. Or il faut être très fort pour surmonter ce désespoir et le sentiment d’impuissance qui l’accompagne autrement que par une certaine violence, au moins verbale. Quand Annick exprime une telle complaisance envers un État qui s’évertue à faire des misères volontaires à la population, il faut être extrêmement solide pour ne pas céder à la violence verbale. Quand en outre Annick exploite un propos prétendument violent pour se faire mousser et jouer les victimes tout en regardant son petit nombril, histoire d’apporter du grain à moudre au moulin de la diffamation de ceux qui souffrent, il est impossible que cela ne dégénère pas. Parce que la chérie se plaint beaucoup, mais elle, elle n’a pas perdu son boulot, sa situation, et vit en privilégiée. Si elle avait été malade, elle ne dirait pas que l’État ne s’en prend pas physiquement aux personnes, ne serait-ce qu’en ne les soignant pas correctement.

Alors bien sûr, il est commode de se lamenter (elle ne sait faire que ça, semble-t-il), de ce que ces pauvres Conseillers Fédéraux ne peuvent plus prendre le train ou aller au restaurant comme ils le faisaient avant. Est-ce que le fait de ridiculiser et de diffamer ceux qui souffrent ou qui pensent autrement n’aurait pas un effet amplificateur? Attention Annick, parce que Dieu se rit des hommes (et aussi des femmes) qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes.

Et puisque vous convoquez Charlie dans une citation, laissez-moi vous dire qu’il serait bon de retenir certaines leçons d’un tel drame. Ce n’est pas parce qu’un tel drame a eu lieu que Charlie devrait se croire autorisé à outrager et blesser gratuitement avec pour circonstance aggravante de stigmatiser outrageusement les mauvaises personnes. Le dessinateur Charb ne disait-il pas que le fait que les catholiques ayant entamé contre le journal dit satirique quatorze procédures contre deux seulement par les organisations musulmanes était la preuve que les intégristes catholiques étaient bien plus dangereux? La suite on la connaît: deux prêtres en soutane se réclamant de la Fraternité Saint Pie X ont fait irruption dans les locaux de la rédaction armés de fusils d’assaut.

Quant à Sami Zaïbi, (encore une pauvre victime), s’il avait fait son enquête en usant de moyens loyaux et déontologiquement irréprochables, il n’aurait pas essuyé des propos un peu musclés. Quand on utilise des méthodes de voyous, il ne faut pas s’étonner de recevoir des réponses de voyous. Quand on fait du journalisme de caniveau, on récolte des réactions de même niveau. J’ai déjà eu l’occasion de dire ce que je pensais de Sami Zaïbi et m’inscris en faux contre toute violence ou menace de violence physique à son encontre.

Je conclurai en disant que contrairement à ce que vous affirmez, ce n’est pas l’épidémie qui a généré la haine. C’est la manière de traiter les gens. Votre autisme radical ne fait qu’aggraver les choses.

Vous n’êtes rien qu’une petite enfant ultra gâtée par le système. Qu’une petite fille aux allumettes qui n’a pas encore appris qu’à force de jouer avec les allumettes, on finit par mettre le feu.

Jacques Frantz

La menace de mort de trop
Photo article
Photo : Shutterstock / Tetiana Yurchenko
C’était dimanche passé, à 7 heures du matin. Je découvre sur le fil Facebook de Heidi.news, sous un article que j’ai rédigé, ce commentaire d’un internaute:

«Le 16/10/1946, le journaliste nazi Julius Streicher fut pendu à Nuremberg pour avoir endormi le peuple sur les crimes du troisième Reich: …le Tribunal a conclu qu’un tel soutien médiatique à des crimes de guerre constituait lui-même un crime…
Il faudra penser à requalifier en crime contre l’humanité le fait d’avoir:
ruiné l’économie,
contaminé la population avec ses propres peurs irrationnelles,
provoqué des drames en santé mentale et des suicides, ainsi que
mis l’épidémie à profit pour s’enrichir avec des chimères ainsi que ruiner l’état de droit et les libertés fondamentales.»

Je l’ai lu et relu avant d’en saisir la portée réelle: cette personne me souhaite une mort par pendaison parce que je serais complice d’un gouvernement suisse qui serait en train de commettre des actes aussi graves que ceux de l’Allemagne du troisième Reich.

Mon premier réflexe a été de vouloir effacer ledit message, peut-être le signaler à Facebook et passer à autre chose. Mais… Ce n’était pas une menace de mort anonyme, un compte bidon. Elle émanait d’une personne qui assume à visage découvert et vit en Suisse.

Ces mots violents m’ont affectée. J’en ai pas dormi de la nuit. Lundi matin, c’est la mine défaite que je suis allée au poste de police avec des captures d’écran sur mon portable. Les policiers ont confirmé la gravité de la menace. Ils ont demandé si je voulais déposer plainte. Ce que j’ai fait. Durant la déposition, il a fallu prouver mon identité et donner mon adresse. J’ai pris peur. L’auteur du commentaire aura accès au dossier. Faut-il donner son adresse à quelqu’un qui trouve que je dois mourir par pendaison? J’ai pensé à ma famille, mes enfants. Et me suis rétractée. Que faire? Laisser cette menace impunie? Finalement, avec l’adresse de la rédaction de Heidi.news, la plainte reste recevable.

Les jours suivants, je me suis interrogée sur l’éventualité d’un passage à l’acte, de ce que je risquais réellement. J’ai minimisé et tenté de me rassurer. Mais un coup de téléphone avec l’avocat de Heidi.news m’a remis les idées en place: c’est bien une menace de mort, elle est grave, il faut la prendre au sérieux et il me soutient dans ma démarche. En cas de condamnation, la personne risque des jours amendes avec sursis et l’inscription du délit à son casier judiciaire. Cela ne l’empêchera peut-être pas de récidiver, mais sa menace de mort ne restera pas impunie. Et l’avocat d’expliquer: «La menace de mort peut inciter d’autres à faire de même, il faut éviter qu’un détraqué passe à l’acte.»

Ce n’est pas la première fois que je subis des menaces, des intimidations et des violences verbales. D’ordinaire, je ne tremble pas quand des agressifs, bien cachés derrière un pseudo sur Twitter, traitent l’ensemble des journalistes de Heidi.news de «raclures». Pas non plus quand les autorités font pression sur tel ou tel sujet, me refusent l’accès à des conférences de presse, ne répondent pas à mes questions, dépêchent la police pour accueillir les journalistes visitant un laboratoire hospitalier ou me sermonnent vertement. Je ne tremble pas parce que je vis avec une certitude: l’Etat, s’il désire me museler ou m’intimider, n’attentera pas à mon intégrité physique. C’est le luxe de nos démocraties.

En vérité, cette menace de mort qui m’a fait réagir réussit là où beaucoup ont échoué. «Quand on reçoit une menace de mort, on va tendanciellement faire moins bien son travail, disait l’avocat. Vous, les journalistes, n’êtes pas des héros. Personne ne l’est en fait. Personne n’a envie de mourir sur l’autel de la démocratie. Une telle menace peut vous inciter à l’auto-censure, pour vous protéger.» C’est tout le paradoxe de la situation: un quérulent me pousse au repli alors que les pressions des autorités m’incitent à poursuivre mon travail. La tentation revient d’abandonner la partie et de n’écrire plus que sur les petits chats.

Au-delà de ma personne, j’observe avec tristesse une dégradation du climat en Suisse. La surenchère des violences verbales m’inquiète. Il pleut des menaces, les fourches sont de sortie et les têtes mises à prix. La police fédérale a renforcé la protection des membres du gouvernement dans un pays où, habituellement, ils peuvent prendre le train comme tout le monde. Certains scientifiques ont peur d’ouvrir leur courrier après avoir reçu des enveloppes contenant de la poudre blanche. Les journalistes qui sont invectivés et reçoivent des menaces de mort (je ne suis hélas pas la seule) n’osent pas, ou peu, porter le débat sur la place publique. La peur.

Même chez Heidi.news, les menaces de mort laissent perplexe. Lorsque un internaute s’est cru drôle en écrivant sur Facebook «Heidi finira comme Charlie» à la suite de notre série sur les complotistes ou qu’une petite chanson sur Soudcloud appelle à «péter les dents, trouer le cul et faire la peau» de Sami Zaïbi, l’auteur de cette enquête, Serge Michel, notre directeur éditorial, a hésité. Il n’a finalement pas porté plainte, obtenant plutôt que les auteurs des menaces se rétractent.

L’épidémie a radicalisé les opinions, fait grandir la haine contre les journalistes prétendument vendus au système, complices des autorités, voire soudoyés par elles. Mais que l’on soit pour le port du masque ou contre, que l’on soit convaincu que le vaccin contient une puce ou non, que l’on soit persuadé que Bill Gates a tout orchestré ou au contraire qu’on nie l’existence même du virus et de l’épidémie, c’est la haine qui est en train de gagner la partie.

Peu importe que l’on penche pour une stratégie musclée visant à atteindre le zéro Covid ou que l’on soit prêt à laisser circuler le virus et tout rouvrir très vite, les invectives pleuvent. En Suède, «la stratégie face au Covid–19 polarise à l’extrême», relève Le Monde. Stockholm a peu confiné sa population. Mais plusieurs employés de l’Agence de santé ont fait l’objet d’une protection policière après avoir reçu des menaces de mort. En première ligne, le chef épidémiologiste, Anders Tegnell, architecte de la stratégie suédoise. Un de ses pourfendeurs estime qu’il mérite d’être «exécuté en direct sur SVT» – la chaîne de télévision publique. De son côté, Amina Manzoor, journaliste santé au Dagens Nyheter, a annoncé sa démission. Favorable à la stratégie suédoise, elle n’a pas été assez soutenue par sa rédaction «face aux attaques dont elle a été la cible».

Les attaques pénalement répréhensibles – quelles qu’elles soient – génèrent de la peur et créent un climat favorable au passage à l’acte. Même si vous pensez que l’internaute ne veut pas vraiment que je sois pendue, son message est grave. Parce que c’est toute la dynamique que prennent nos échanges sur internet qui représente un danger. La légèreté avec laquelle certains acteurs du débat public utilisent violence et excès verbaux sont-ils à l’origine de cette accumulation? Quand l’UDC parle de dictature sanitaire en Suisse, quand un «gilet jaune» veut «foutre une balle dans la tête» d’Emmanuel Macron, quand les supporters trumpistes élèvent une potence devant le Capitole…

Les haineux qui menacent de mort n’ont peut-être pas conscience de l’effet qu’ils produisent sur leurs victimes. Mais ils devraient réfléchir au contenu de leurs commentaires avant de les publier. Même si ça y ressemble, les réseaux sociaux ne sont pas le café du commerce où l’insulte s’efface d’un coup de chiffon sur le zinc une fois le verre de blanc avalé. Vous êtes ici dans un espace public, des centaines de gens vous écoutent. Et la menace de mort publique est pénalement répréhensible.

J’aimerais finir ce message sur une note positive. Chez Heidi.news, nous essayons de cultiver l’échange constructif avec nos lecteurs. Les débats sont parfois vifs et engagés, et nous acceptons volontiers les critiques. Des lecteurs décèlent des erreurs dans certains de nos articles, nous les corrigeons. D’autres estiment que nos écrits sont graves, indignes, déplacés… nous essayons de leur répondre. Dans tous les cas, nous invitons les gens à s’exprimer et à partager leurs avis, nous ne cachons pas les nôtres même si nous sommes surtout attachés à la récolte des faits et que nous distinguons l’information du commentaire. Bref, échangez, critiquez, mais ne menacez pas! Car la peur et la violence que les menaces charrient avec elles ne feront jamais avancer le débat public.

4 commentaires

  1. Juste quelques références, histoire de rendre à césar… « Tout ce qui est excessif est insignifiant. » (Napoléon Bonaparte). « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes; » (Bossuet).

    1. C’est bien Isabelle de mettre les références. J’avoue que j’ai été paresseux et que je me suis dit que ces citations étaient tellement connues que bon tout le monde y retrouverait ses petits.
      J’ai un doute pour la citation de Napoléon. Je croyais que c’était Taleyrand. Vu que tu n’es pas la seule à l’attribuer à Napoléon, je me range bien volontiers dans le camp corse.
      JF

  2. « un État qui
    s’évertue à faire des misères volontaires à la population, il faut être extrêmement solide pour ne pas céder à la violence verbale.  » en voilà une expression pas excessive, du même orde de « la grosse Obama »

    1. C’est tout simplement une réalité. Lorsque des décideurs politiques décident d’enfermer les gens chez eux sans aucune nécessité ou encore quand ils imposent à la population une immigration de masse génératrice de souffrance et de misère, c’est aussi une volonté de faire du mal aux personnes qu’on a pour tache d’administrer. Je passe toutes les humiliations et vexations que subissent les gens au quotidien de la part d’une oligarchie gangrenée par la concussion.
      Quant à la grosse Obama, si j’ai fait de la peine à une de mes lectrices qui aurait abusé du Nutella j’en suis désolé pour elle et lui recommande de manger plus équilibré.

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